Volcans et visions à Lanzarote

Lorsque le tourisme de masse a atteint les Canaries dans les années 1960, quelqu’un a émis une thèse révolutionnaire : “Le tourisme peut être beau”. César Manrique, peintre, sculpteur et visionnaire, changea ainsi le destin de Lanzarote. Il voulait faire découvrir la beauté de l’île aux visiteurs, sans détruire le paysage par un tourisme de masse ou une architecture inadaptée. Au milieu du champ de lave noire, entouré de murets de pierre et de champs arides, se trouve le Monument du paysan. Avec ce monument, Manrique rend hommage aux agriculteurs qui, malgré les conditions les plus défavorables, produisaient des aliments sur cette île volcanique aride.

Sculpture Monumento al Campesino de César Manrique à Lanzarote / © Photo : Georg Berg
Sculpture Monumento al Campesino de César Manrique à Lanzarote / © Photo : Georg Berg

L’héritage de Manrique est visible partout : les maisons blanches aux volets verts, bleus ou bruns, aucun bâtiment plus haut qu’un palmier, l’interdiction des panneaux publicitaires. Ses œuvres d’art montrent comment l’homme et la nature peuvent s’harmoniser sans se détruire. En 1966, il est revenu de New York à Lanzarote pour protéger sa patrie du tourisme de masse. Son engagement en faveur d’un tourisme durable et d’une architecture respectueuse marque l’île de son empreinte jusqu’à aujourd’hui. 30 ans après sa mort, Lanzarote est devenue une réserve de biosphère de l’UNESCO.

L’eau du néant – l’art de la survie

L’eau a longtemps été une denrée rare. Avant que l’eau de mer ne soit dessalée, les habitants comptaient chaque goutte. Ils recueillaient la pluie sur des surfaces de calcaire blanc dans des citernes. Même l’eau de cuisson était transmise entre voisins – non pas pour arroser, mais pour y refaire la cuisine.

Vignes à Lanzarote. La surface claire derrière la maison recueille les précipitations dans une citerne / © Foto : Georg Berg
Vignes à Lanzarote. La surface claire derrière la maison recueille les précipitations dans une citerne / © Photo : Georg Berg

Des Berbères viennent les ingénieux Enarenados – champs de vignes où chaque cep est protégé du vent dans une cuvette de pierre. Des Normands, l’économie systématique des citernes. Chaque maison devenait un piège à pluie, chaque goutte d’eau était recueillie dans des citernes. Les surfaces de collecte de l’eau derrière les fermes montrent ce que Manrique a érigé en principe d’intégration harmonieuse : L’architecture doit coopérer avec la nature à Lanzarote.

Aujourd’hui, Lanzarote pratique le dessalement moderne de l’eau de mer – malheureusement en grande partie avec des générateurs diesel, bien que l’île dispose d’un énorme potentiel éolien et de beaucoup de soleil. Jusqu’à présent, seul un cinquième environ de l’électricité provient de sources renouvelables. Avec une volonté politique, un nouveau chapitre pourrait être ajouté à la stratégie d’avenir durable.

Avant l'existence des usines de dessalement d'eau de mer à Lanzarote, l'eau potable était rare. Aujourd'hui, elle est toujours précieuse, comme par exemple à l'hôtel Secrets Lanzarote Resort and Spa. L'établissement dispose d'une longue piscine juste devant les chambres / © Photo : Georg Berg
Avant l’existence des usines de dessalement d’eau de mer à Lanzarote, l’eau potable était rare. Aujourd’hui, elle est toujours précieuse, comme par exemple à l’hôtel Secrets Lanzarote Resort and Spa. L’établissement dispose d’une longue piscine juste devant les chambres / © Photo : Georg Berg

L’agriculture dans les sables volcaniques

Viticulture à Lanzarote avec des murs de pierre pour se protéger du vent et des bouteilles d'eau pour l'irrigation / © Photo : Georg Berg
Viticulture à Lanzarote avec des murs de pierre pour se protéger du vent et des bouteilles d’eau pour l’irrigation / © Photo : Georg Berg

À La Geria, la célèbre région viticole de Lanzarote, on voit comment les paysans ont fait de la nécessité une vertu depuis des siècles. Le paysage est parsemé de milliers de petits cratères de cendre de lave noire, entourés de murs de pierre en forme de demi-lune. Le secret s’appelle Picón : du sable volcanique noir et poreux qui retient l’humidité nocturne des alizés. Il refroidit le sol et permet, sur cette île sans rivières, la culture du vin Malvasía-Volcánica.

Des touristes explorent la région viticole de La Geria à vélo / © Photo : Georg Berg
Des touristes explorent la région viticole de La Geria à vélo / © Photo : Georg Berg
Rangée de ballons de vin verts à Lanzarote au coucher du soleil. Lors de la fermentation traditionnelle semi-ouverte, une pierre protège le vin des impuretés / © Photo : Georg Berg
Une rangée de ballons de vin verts à Lanzarote au coucher du soleil. Lors de la fermentation traditionnelle semi-ouverte, une pierre protège le vin des impuretés / © Photo : Georg Berg

L’or rouge des cactus – La révolution de la cochenille

La cochenille, cultivée depuis le XVIe siècle au Mexique sur des cactus opuntia, fournissait le colorant rouge le plus recherché au monde. L’Espagne contrôlait le marché du rouge carmin, avec lequel on teignait les robes royales, les robes des cardinaux et, plus tard, même les rouges à lèvres. Pendant deux siècles, Lanzarote a eu le monopole de cet or rouge – jusqu’à ce que les couleurs synthétiques changent la donne. Aujourd’hui encore, on voit partout des champs de cactus en terrasses, témoins muets d’une époque où une île volcanique aride dominait le marché européen du luxe. Jusqu’en 2006, la couleur du Campari provenait encore de la cochenille des Canaries.

Aujourd’hui, on peut toujours acheter des souvenirs en cochenille à Lanzarote, par exemple des rouges à lèvres naturels et des produits cosmétiques qui utilisent ce colorant durable. Une longue tradition se perpétue ainsi à petite échelle, alliant agriculture et artisanat local.

Sacs à motif cochenille-Lanzarote sur un bateau au large de Lanzarote / © Photo : Georg Berg
Sacs à motif cochenille-Lanzarote sur un bateau au large de Lanzarote / © Photo : Georg Berg
Le jardin de cactus El Jardín de Cactus, à Lanzarote, abrite quelque 4 500 espèces de cactus provenant des cinq continents. Il a été conçu par César Manrique et est aménagé dans une ancienne décharge en amphithéâtre en terrasses avec des murs en pierre de lave / © Photo : Georg Berg
Le jardin de cactus El Jardín de Cactus à Lanzarote abrite environ 4.500 espèces de cactus provenant des cinq continents. Conçu par César Manrique, il est aménagé en amphithéâtre en terrasses avec des murs en pierre de lave dans une ancienne décharge qui était auparavant une carrière de pícon / © Photo : Georg Berg

César Manrique : artiste et gardien de l’île

Manrique imposa des règles claires : des maisons blanchies à la chaux, des enseignes publicitaires discrètes, des volets verts, bleus ou bruns – des couleurs symbolisant l’agriculture, la pêche et l’artisanat. Il a associé l’art et la nature de manière unique : Dans sa fondation, les visiteurs se promènent dans des grottes de lave ; dans les Jameos del Agua, il a transformé un tube volcanique en salle de concert et restaurant ; du Mirador del Río, on a une vue spectaculaire sur l’Atlantique et l’île de La Graciosa.

Des maisons blanches à Lanzarote avec des cadres de fenêtres verts et bleus. Les couleurs sont définies : Bleu pour les pêcheurs, vert pour l'agriculture et marron pour l'artisanat / © Photo : Georg Berg
Maisons blanches de Lanzarote avec des cadres de fenêtres verts et bleus. Les couleurs sont définies : Bleu pour les pêcheurs, vert pour l’agriculture et brun pour l’artisanat / © Photo : Georg Berg
Intérieur d'une grotte de lave à la Fondation César Manrique de Lanzarote / © Photo : Georg Berg
Intérieur d’une grotte de lave à la Fondation César Manrique de Lanzarote, installée dans son ancienne maison / © Photo : Georg Berg
Jameos del Agua à Punta Mujeres sur Lanzarote a été conçu par César Manroque. Le tube de lave s'étend de la surface de la terre jusqu'à la surface de la mer et contient un lac salé naturel alimenté par l'eau de mer qui s'infiltre / © Photo : Georg Berg
Jameos del Agua à Punta Mujeres a été transformé par César Manrique d’une décharge en un lieu de rencontre. Le tube de lave s’étend de la surface du sol jusqu’en dessous de la surface de la mer et contient un lac naturel d’eau salée alimenté par l’eau de mer qui s’infiltre / © Photo : Georg Berg
Vue du Mirador del Rio sur l'île de La Graciosa, qui fait partie de Lanzarote / © Photo : Georg Berg
Vue du Mirador del Rio sur l’île de La Graciosa, qui fait partie de Lanzarote / © Photo : Georg Berg

Chaleur volcanique dans le parc national de Timanfaya

En six ans, entre 1730 et 1736, de nombreuses cheminées volcaniques se sont ouvertes et des coulées de lave ont enseveli environ un quart de la surface de l’île de Lanzarote, détruisant des villages entiers et modifiant durablement le paysage. La route qui traverse le parc national ne peut être empruntée par les voitures, mais uniquement par les autocars. Une randonnée guidée sur un itinéraire de 12 kilomètres vaut cependant la peine pour se faire une idée de l’endroit où des paysans ont dû autrefois reconstruire leur existence.

Centre d'information Islote de Hilario sur un cratère du parc national de Timanfaya / © Photo : Georg Berg
Centre d’information Islote de Hilario sur un cratère du parc national de Timanfaya / © Photo : Georg Berg

Les montagnes de feu de Timanfaya sont plus que de simples motifs photographiques spectaculaires. Elles sont une leçon de résilience. Là où les astronautes de la NASA ont jadis répété des alunissages, des lichens timides poussent à nouveau aujourd’hui. La nature revient – mais très, très lentement.

Le paysage volcanique n'a que 300 ans, mais les traces de pas restent visibles pendant 8 ans, jusqu'à ce qu'elles soient altérées. C'est pourquoi il ne faut pas quitter les sentiers de randonnée labellisés / © Photo : Georg Berg
Le paysage volcanique n’a que 300 ans, mais les traces de pas restent visibles pendant 8 ans, jusqu’à ce qu’elles soient altérées. C’est pourquoi il ne faut pas quitter les sentiers de randonnée balisés / © Photo : Georg Berg

Au parc national de Timanfaya, on ressent encore aujourd’hui l’énergie volcanique de près : les rangers versent de l’eau dans les fissures de la terre, d’où jaillit quelques secondes plus tard de la vapeur chaude. Ici, on fait même des grillades sur la chaleur du volcan.

A Lanzarote, des tuyaux encastrés dans des cendres volcaniques rouges forment un geyser artificiel / © Photo : Georg Berg
A Lanzarote, des tuyaux encastrés dans des cendres volcaniques rouges forment un geyser artificiel / © Photo : Georg Berg

Connaître activement Lazarote

On ne se rend pas à Lanzarote uniquement pour se faire dorloter. La rude île des Canaries est idéale pour toutes sortes de vacances actives. Il n’est pas nécessaire de participer à l’Ironman, qui a la réputation d’être plus difficile à Lanzarote qu’à Hawaï. Les randonnées en vélo électrique sont devenues l’une des manières les plus populaires de découvrir Lanzarote pour les moins ambitieux. Ils permettent de franchir les passages tout-terrain escarpés sans manquer les nuances du paysage. L’île est suffisamment petite pour que l’on puisse en faire l’expérience complète, mais suffisamment variée pour tous les niveaux. Des équipes professionnelles utilisent Lanzarote comme camp d’entraînement hivernal.

Les chemins à travers le paysage volcanique de Lanzarote sont en partie escarpés et non goudronnés. Heureux celui qui se déplace en vélo électrique / © Photo : Georg Berg
Les chemins à travers le paysage volcanique de Lanzarote sont en partie raides et non stabilisés. Heureux celui qui se déplace en vélo électrique / © Photo : Georg Berg
Kayakistes devant les plages de Papagayo. Ici, en 1402, les conquérants normands Jean de Béthencourt et Gadifer de la Salle ont débarqué pour soumettre l'île au nom de la couronne de Castille / © Photo : Georg Berg
Cajakistes devant les plages de Papagayo. C’est ici que les conquérants normands Jean de Béthencourt et Gadifer de la Salle ont débarqué en 1402 pour soumettre l’île au nom de la couronne de Castille / © Photo : Georg Berg

Les alizés constants font de Lanzarote la Mecque du surf, du kite et de la voile. Les spots sont volontairement développés de manière durable et les sports nautiques sont possibles toute l’année. Un peu à l’écart des zones touristiques se trouvent les plages naturelles de Famara et de l’île voisine de La Graciosa.

Le voyage de recherche a été soutenu par l’Office du Tourisme Espagnol

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