Le monastère cistercien de Neuzelle est considéré comme le miracle baroque du Brandebourg. Il s’est imposé comme le centre de la Contre-Réforme dans la Prusse protestante. Depuis sa fondation en 1268, le monastère a survécu aux raids, aux incendies et à tous les changements de système. Aujourd’hui, il se présente comme un monastère entièrement conservé avec deux églises baroques, un cloître de style gothique tardif et un vaste jardin de monastère, également aménagé selon des plans baroques.

L’héritage historique du lieu est préservé avec succès par la fondation Stift Neuzelle. Tous les bâtiments sont utilisés, comme école et internat, comme salles de spectacle, café ou salles de musée modernes. Le jardin du monastère, qui offre une vue étendue sur la plaine alluviale de l’Oder jusqu’en Pologne, et les opulentes salles de l’église sont impressionnants. Un réseau de pistes cyclables et de sentiers de randonnée mène également les visiteurs devant la porte du monastère. L’histoire du monastère, vieille de plus de 750 ans, parle de départ et de crise, de fin et de nouveau départ. Le nom de Neuzelle semble être ici tout un programme, car il s’y crée encore beaucoup de choses étonnantes.

Les moines sont de retour
Jusqu’à sa dissolution en 1817, Neuzelle était un petit monastère cistercien, mais très actif. Jamais plus de 40 moines n’ont vécu à Neuzelle. Lorsqu’ils durent s’en aller au XIXe siècle sur décision du roi de Prusse Frédéric-Guillaume III, les bâtiments du monastère furent utilisés comme églises pour les communautés protestante et catholique, ainsi que comme école et institut de formation des enseignants. Cette utilisation a perduré et a même survécu à la diaspora idéologique dans laquelle l’église s’est trouvée à l’époque de la RDA. Après la chute du mur et la réunification de l’Allemagne, le monastère est devenu la propriété de la fondation Stift Neuzelle et une phase de restauration coûteuse a commencé.

Collecte de fonds pour l’avenir
En 2018, même les moines reviennent après plus de 200 ans. L’ordre des Cisterciens, qui a autrefois construit le monastère de Neuzelle, fonde un prieuré à Neuzelle. Le petit couvent, qui compte actuellement six moines, deux candidats et un novice, a de grandes ambitions. A environ huit kilomètres du monastère historique, un nouveau monastère doit voir le jour à Treppeln, en pleine forêt, sur le site d’un ancien établissement de la Stasi. À la question de savoir pourquoi la première pierre d’un nouveau monastère sera posée en 2023 à côté d’un magnifique site historique, les moines répondent de manière très cosmopolite via une campagne sur les médias sociaux. Étant donné que l’abbaye de Neuzelle a été entièrement convertie à une utilisation culturelle, que tous les bâtiments sont occupés et que de nombreuses manifestations très fréquentées ont lieu toute l’année sur le site de l’abbaye, les moines souhaitent un lieu de retraite où ils pourront trouver le calme nécessaire à une vie spirituelle. Mais avant d’en arriver là, ils doivent beaucoup se montrer en public afin de récolter les fonds nécessaires. Ce que l’on appelait autrefois la collecte s’appelle aujourd’hui le fundraising. Par vidéo YouTube et podcast, les moines annoncent déjà leur bonne nouvelle.

Résurrection en 14 actes
Une autre résurrection peut être admirée depuis 2015 au monastère de Neuzelle. Le musée du Théâtre céleste se consacre à une découverte surprise, faite en 1997, en pleine phase de restauration du monastère. Une tendance du baroque, surtout en Bohème, en Bavière et au Tyrol, était de reproduire le tombeau de Jésus. Entre Pâques et la Pentecôte, des décors imposants étaient installés devant l’autel. A Neuzelle, un théâtre de coulisses complet a été conservé, qui pouvait présenter 14 scènes de la Passion dans cinq décors. Pour cette découverte inhabituelle et complète, un musée spécifique a été construit dans le vignoble du monastère. Les visiteurs sont conduits à travers un tunnel sombre jusqu’à une enseigne lumineuse avec une citation du prophète Jesaya. Sa tombe sera glorieuse. En effet, les décors éclairés dans l’espace sombre ne manquent pas de faire leur effet. Deux scènes de la Passion sont présentées à chaque fois dans une splendeur baroque et presque grandeur nature. Les décors servaient à partir de 1750 à Neuzelle à dramatiser les événements de Pâques et de la Passion. On n’y jouait pas de théâtre. Les personnages et les décors installés servaient à la contemplation et à la méditation. C’est probablement vers 1863 que le théâtre céleste a cessé d’exister. Il a fallu 135 ans et beaucoup de travail de restauration pour le ressusciter.

La géométrie dans le jardin du cloître
À l’époque baroque, même un jardin potager devait être beau. Aujourd’hui, tous ceux qui visitent le jardin du monastère de Neuzelle en profitent. Celui qui visite le domaine du monastère pour la première fois se voit offrir, en plus de l’entrée gratuite, un effet wow particulier. Pour accéder au jardin, il faut traverser la vaste place de l’abbaye. Derrière les barreaux de fer d’une clôture de jardin se trouve soudain, trois terrasses plus bas, le jardin du monastère avec ses axes visuels et ses formes géométriques. Le regard embrasse les jardins baroques et la plaine alluviale de l’Oder jusqu’en Pologne. À partir de 1755, l’abbé Gabriel fit construire ce magnifique jardin dans l’esprit de l’absolutisme qui consistait à tout asservir, même la nature. Il s’agissait d’une mise en scène parfaite et déjà très coûteuse à l’époque. La nature fut géométrisée et quelques vanités du baroque furent ajoutées, comme une orangerie de 120 pomerangs ou un pavillon d’œillets pour le dianthus, la fleur divine qui évoque les souffrances du Christ.

Le jardin du monastère de Neuzelle est le seul jardin baroque du Brandebourg et fait partie des 50 jardins les plus importants d’Allemagne. Il a fallu 25 ans pour explorer et réaménager le jardin. Presque tout le jardin était boisé. Lors de la restauration, on s’est prudemment rapproché des anciennes structures, raconte le chef jardinier Ralf Mainz. Parmi les nombreux arbres qui n’avaient rien à faire dans le baroque ordonné, on a trouvé cinq ifs. Les espaces entre les seniors âgés de 300 ans ont été à nouveau comblés par des ifs coniques.

Fruits gourmands et cuisine sauvage du monastère
Début mars, il ne se passe pas encore grand-chose dans le jardin potager. Les oignons à étages sont dans les plates-bandes et la rhubarbe est déjà sortie de terre. Les 120 orangers sont encore dans leurs quartiers d’hiver. Dès qu’il fera assez chaud, ils feront place à l’orangerie, qui sera alors à la disposition des visiteurs comme café et lieu de manifestation. Des discussions sur les jardins sont régulièrement organisées avec des spécialistes sur la tradition des jardins de cuisine ou l’entretien des agrumes. L’orangerie a déjà connu de nombreuses utilisations. Après la dissolution du monastère, elle a probablement été l’un des premiers bâtiments à être utilisé comme gymnase.

Les plates-bandes de la cuisine sont gérées toute l’année par l’équipe de jardinage du monastère. Le vin sucré et les petits arbres à ficelle avec des pommes doivent être dégustés en flânant, comme à l’époque baroque. En attendant, les visiteurs doivent se contenter de baies à grignoter, ce qu’ils font avec enthousiasme, révèle le jardinier Ralf Mainz. La récolte des plates-bandes de la cuisine ira en grande partie dans la cuisine du monastère sauvage de Manuel Bunke.

Le chef Bunke a ouvert le restaurant WKK non loin du monastère. Il aspire à un art culinaire moderne et urbain en harmonie avec la nature. La coopération avec le jardin du monastère est synonyme de trajets particulièrement courts. Il apprécie les anciennes variétés de légumes comme le topinambour et l’avoine ou les choux qu’il reçoit du jardin du monastère. Nose-to-Tail et Leaf-to-Root sont les credos de son amour du pays vécu. Après de nombreuses années passées sur la route, il cuisine depuis 2018 une carte saisonnière qui accorde une importance particulière à l’origine régionale et à la valorisation globale des aliments.

Révolution de la bière à la brasserie de l’abbaye
Depuis 1589, la brasserie de l’abbaye brasse de la bière destinée à la vente. Le best-seller de la brasserie est la Schwarze Abt, une bière noire de longue tradition, enrichie de sucre et de la bénédiction du pape François. Il faut absolument goûter ce classique de Neuzell lors d’une visite guidée de la brasserie ou dans les restaurants des environs. Outre un assortiment de bières large et créatif, la brasserie de l’abbaye fait surtout parler d’elle depuis début 2023 avec une idée qui pourrait révolutionner le marché de la bière. Il s’agit d’une bière sans processus de brassage. En savoir plus sur la bière en poudre de la brasserie de l’abbaye de Neuzelle.

Plus d’informations sur le monastère cistercien de Neuzelle, le musée du monastère dans le cloître, le théâtre céleste et le jardin du monastère ici. Pour une visite de la Wilden Klosterküche, le restaurant WKK du chef Manuel Bunke, il est conseillé de réserver une table. Vous trouverez d’autres conseils et destinations sous Reiseland Brandenburg. Nous vous recommandons vivement de combiner cette visite avec celle de la ville modèle socialiste d’Eisenhüttenstadt, située à seulement 10 kilomètres, qui est également le plus grand monument de surface d’un seul tenant en Allemagne.