Aujourd’hui, je remonte le temps d’un demi-siècle. Je suis en effet toujours surpris d’avoir reçu l’une des meilleures inspirations de voyage lorsque j’étais encore à l’école. La très sévère professeure de français a fait preuve d’un enthousiasme inattendu lorsqu’elle a raconté une expérience de voyage à la classe. C’est pour cette raison que quelques années plus tard, avec quelques amis, nous sommes allés camper dans le village magique des Saintes-Maries-de-la-Mer, dans un camping plein de courants d’air. La Brise nous avons planté notre tente. Pour ne rien manquer, nous étions déjà partis en Camargue à la mi-mai.
En l’espace d’une semaine, ce village endormi du sud de la France change complètement de caractère. À notre arrivée, la vie quotidienne en Camargue est encore contemplative. Sur les terrasses des bistrots, les rares touristes trouvent encore facilement une table et les hippies trouvent particulièrement progressif de s’asseoir par terre. Cette atmosphère est typique de l’année 1978.
Une exception bienvenue et traditionnelle
Depuis le toit de l’église-barrage Notre-Dame-des-Saintes-Maries, nous laissons notre regard errer sur le vaste delta de l’embouchure du Rhône. Un mouvement constant à l’horizon se révèle être une interminable caravane de caravanes. Elles occupent bientôt chaque espace inutilisé du village.
Chaque mois de mai, le nombre d’habitants des Saintes-Maries-de-la-Mer est multiplié par plus de dix. Derrière les innombrables caravanes des familles roms venues s’installer dans la rue, les maisons en dur de cette commune de 2.000 âmes se font bientôt à peine remarquer. Jusqu’à aujourd’hui, je ne peux pas imaginer une utilisation plus optimale de l’espace disponible et une meilleure cohabitation de différentes cultures.
Les nouveaux arrivants sont accueillis avec un grand bonjour, puis on leur fait signe de prendre leur place sans trop d’agitation. La musique flamenco souligne l’atmosphère sereine et détendue. Mais il n’y a pas de concert et aucun système n’est visible pour nous, les étrangers. Des guitaristes se précipitent dans les rues et, sans annonce apparente, un groupe formé au hasard entonne soudain l’un des classiques du flamenco.
Une origine religieuse
Ce n’est qu’en 1935 que la procession aux Saintes-Maries-de-la-Mer a été fondée par Folco de Baroncelli-Javon sous la forme devenue traditionnelle. Depuis cette année, les Roms ne sont plus seulement tolérés lors de la fête, mais y jouent un rôle prépondérant.
Selon la légende, les Saintes Maries sont arrivées ici par la mer et Sara, une femme noire originaire d’Egypte, les aurait accompagnées en tant que servante. Comme les Roms de Camargue s’appellent Gitanos (ceux d’Égypte), ils vénèrent Sara la Noire comme leur sainte.
Avec le musée portant le nom de Folco de Baroncelli-Javon, les Saintes-Maries-de-la-Mer rendent hommage au marquis à l’origine de la tradition camarguaise et des gardians à cheval / © Photo : Georg Berg
Les Roms de Camargue se nomment eux-mêmes Gitanos
Le flamenco typique de la Camargue est également appelé flamenco gitan. Il met davantage l’accent sur la nostalgie romantique que sur la mélancolie des cœurs brisés. Les amateurs de flamenco classique le considèrent plutôt comme mièvre. Au cours de notre voyage, nous avons rencontré les figures emblématiques de ce style musical.
Manolo Bissiere était mondialement connu pour sa musique, mais il a refusé en 1965 un concert au Carnegie Hall de New York. Il a été remplacé à l’époque par Ricardo Baliardo, plus connu sous le nom d’artiste Manitas de Plata (petite main d’argent), qui a effectué plusieurs tournées mondiales au cours des années suivantes.
Les statues de la Vierge dans la crypte
La mystérieuse Sara noire
Selon la légende, Marie Madeleine, Marie Salomé de Galilée et Marie de Cléophas sont arrivées en bateau dans le sud de la France en l’an 40 après Jésus-Christ. Aujourd’hui, leur place permanente est sous l’autel de la crypte de l’église Notre-Dame-des-Saintes-Maries, où des centaines de bougies leur donnent une chaleur énorme.
Mais c’est surtout leur servante, la Sara noire, qui est vénérée comme sainte patronne par les familles roms.
Son apparence change constamment, car on lui met à chaque fois des vêtements qu’elle a cousus elle-même.
Photo : Georg Berg