La cuisine chypriote est influencée par la Grèce et la Turquie, mais aussi par le Moyen-Orient, notamment le Liban. La spécialité culinaire la plus connue de l’île est le haloumi. Ce fromage indéformable fait partie intégrante de la cuisine de la Méditerranée orientale depuis des millénaires. Des spécialités moins connues de la cuisine chypriote sont le molohiya et le kolokasi. Les légumes à feuilles et les tubercules ne poussent nulle part ailleurs en Europe et font partie de la cuisine familiale traditionnelle des familles chypriotes. Le tubercule kolokasi, en particulier, est en recul. On ne le trouve plus dans les restaurants ni sur les buffets somptueux des grands hôtels. Dans les restaurants, le kolokasi a été supplanté par la pomme de terre, qui a également un goût excellent à Chypre. Ce tubercule, dont le goût rappelle un mélange de pomme de terre et de topinambour lorsqu’il est correctement préparé, a ses inconvénients. C’est la technique de coupe qui détermine si l’amidon s’échappe lors de la cuisson et donne un goût savonneux indésirable. Correctement préparé, ce plat anodin est une délicatesse. Mais pour cela, il faut des ambassadeurs culinaires qui portent haut les traditions ancestrales.
On raconte à Chypre que la molohiya, un ragoût de feuilles de mauve, était déjà servie lors du mariage du roi Richard Cœur de Lion et de Bérengère de Navarre en 1191 à Limasol. Cette plante à croissance rapide et riche en feuilles est semée en mai et récoltée dès le mois d’août. Les feuilles sont séparées de la tige et séchées. Sur les marchés de l’île, on peut acheter des feuilles de molohyia séchées tout au long de l’année. Elles sont également un ingrédient très apprécié dans les ragoûts de viande consistants. La spécialité de viande chypriote est le kleftiko, un plat braisé dans lequel la viande d’agneau et parfois de chèvre est cuite à basse température dans des fours traditionnels en terre cuite. Dans les villages, presque chaque jardin abrite un de ces fours ronds autour desquels les familles aiment se rassembler le week-end.
Le village maronite de Kormakitis
Au printemps, Chypre est verte. Elle est fleurie et parfumée, car les orangers et les citronniers sont en pleine floraison et dégagent un parfum intense. La plaine de Mesarya, une plaine alluviale fertile, est une importante zone de production de fruits et légumes dans le nord de Chypre. Le petit village de Kormakitis, situé à l’ouest de Kyrenia (Girne) sur les contreforts de la chaîne de montagnes des Cinq-Doigts et à quelques kilomètres seulement de criques isolées et de longues plages de sable, est un bel exemple de la biodiversité de l’île.
Au printemps, les visiteurs viennent de toutes les régions de Chypre pour admirer la tulipe rouge endémique qui pousse à Kormakitis. Mais le village a une toute autre particularité. Kormakitis est le seul village de Chypre encore exclusivement habité par des maronites. L’histoire de cette communauté chrétienne est marquée par la fuite et l’expulsion. Au septième siècle, les maronites ont fui le Liban et la Syrie pour se réfugier à Chypre. Lorsque les Ottomans ont conquis Chypre en 1571, nombre d’entre eux ont été contraints de se convertir, tandis que d’autres se sont réfugiés dans des régions reculées de l’île. C’est le cas de Kormakitis.
La lutte pour la reconnaissance et la préservation de l’identité maronite avec sa langue araméenne est perceptible lors de la visite d’un office religieux et des discussions avec les habitants dans le café au centre du village. L’histoire mouvementée des maronites à Chypre sera encore à raconter. Le tourisme qui se développe lentement aide la communauté maronite à assurer la pérennité de sa dernière communauté villageoise intacte à Chypre.
Cuisine traditionnelle chez Angeliki
Outre les tulipes rouges, les sentiers de randonnée et la proximité de la mer, les compétences culinaires d’Angeliki Frantzis Katsioloude constituent un attrait particulier à Kormakitis. Son restaurant et boutique-hôtel Hanna Koumi attire des clients des deux parties de Chypre. L’établissement, qui dispose d’une grande terrasse extérieure et de six chambres décorées individuellement, respire l’histoire et l’énergie de son hôtesse. Il a été construit au 16e siècle par la famille Angelikis. Comme tant d’autres maronites, ils ont dû fuir Famagouste pour échapper aux Ottomans et ont fondé le village de Kormakitis.
Angeliki, qui a travaillé de nombreuses années comme chef de cuisine dans de grands hôtels, vit ici son rêve d’une cuisine régionale, voire locale dans la mesure du possible. Les herbes pour les plats traditionnels proviennent du village. Elle se procure les œufs, les légumes, le poisson et la viande dans les environs immédiats. Elle cuit elle-même le pain chaque semaine. Le pain pour la messe du dimanche à la cathédrale Saint-Georges sort également de son four.
Angeliki ne laisse personne entrer dans sa cuisine. Heureusement, c’est une cuisine ouverte, on peut regarder à l’intérieur. Angeliki se tient devant la cuisinière à gaz à plusieurs feux. À une vitesse phénoménale, elle prépare un boulgour savoureux. Dans la grande casserole d’eau, elle verse successivement des grains de boulgour broyés, aussi petits que des grains de riz, du bouillon de poulet, des tomates, des petits macaronis, de l’huile d’olive et des herbes. Son bras gauche cassé est provisoirement posé dans l’écharpe d’une couverture blanche en dentelle. Les invités passent en premier chez Angeliki et ils arrivent en nombre le jour même. Un groupe de 100 invités du sud a réservé pour le déjeuner du dimanche. La cuisine chypriote traditionnelle d’Angeliki, les grandes portions et la cordialité de la famille ont fait le tour de l’île.
Câpres, fenouil de mer et asperges sauvages
La cuisine chypriote utilise aussi traditionnellement des herbes et des légumes sauvages. Dans les prairies et au bord des chemins autour de Kormakitis, les câpres poussent en même temps que les célèbres tulipes rouges. Les pousses fraîches du câprier jaillissent des branches épineuses de l’année précédente. Les collectionneurs les cueillent avec précaution à l’aide de pinces. Les pousses sont plongées dans de l’eau fraîche pendant quelques jours avant d’être mises à macérer dans une saumure vinaigrée. Angeliki sert le kapari en accompagnement de plats traditionnels, du kolokasi au kleftiko.
Contrairement à la Toscane, les asperges sauvages ne sont pas une véritable rareté à Chypre. Les fines tiges vertes sont certes plus chères que les légumes de culture, mais sur les terres fertiles de Chypre, les asperges sauvages poussent en si grandes quantités que les prix astronomiques de leur cousine italienne sont loin d’être atteints.
La proximité de la mer apporte une autre délicatesse à la cuisine chypriote. Le fenouil de mer pousse dans la végétation côtière. Ses feuilles et ses tiges fermes, presque coriaces, sont pleines d’arômes marins. Avant même sa floraison, le fenouil de mer est récolté, trié et conservé dans du vinaigre. Il convient parfaitement pour accompagner le poisson et possède un arôme très particulier, presque floral.
Boutique Hanna Koumi
À Chypre aussi, la diversité des types d’hôtels augmente. Les grands châteaux de lits et les hôtels-casinos sont complétés par des maisons d’hôtes et des petits hôtels. Surtout si l’on se déplace sur l’île en voiture de location et que l’on souhaite découvrir l’arrière-pays et ses villages authentiques. L’hôtel-boutique Hanna Koumi est une aubaine pour Kormakitis. Les touristes peuvent désormais rester plus longtemps dans le village. Des sentiers de randonnée sont aménagés et une meilleure signalisation est en cours de planification. La cuisine traditionnelle d’Angeliki assure les meilleurs repas et les six chambres ont été aménagées avec amour par l’hôtesse, avec des meubles anciens et des murs clairs en briques calcaires.
Que l’on ait choisi un hôtel au sud ou un hébergement au nord de Chypre, que l’on arrive à l’aéroport de Larnaca au sud ou à celui d’Ercan au nord, on peut facilement explorer toute l’île. La Green Line, qui divise l’île de Chypre depuis 1964, n’impose aucune limite à ses propres vacances. Cyprus Travel est un tour-opérateur basé à Chypre et également francophone qui propose des randonnées dans toutes les régions de Chypre et souhaite encourager à franchir la frontière entre le nord et le sud de Chypre. Des circuits en voiture de location avec des réservations d’hôtel individuelles, comme dans le boutique-hôtel Hanna Koumi, en passant par des randonnées, des excursions d’une journée vers des sites culturels et des visites guidées de la ville, tout ce qui fait la particularité de l’île de Chypre est présent. Pour plus d’informations sur l’histoire de l’île divisée, on peut lire les reportages sur le Büyük Han Coffee Club, la ville fantôme de Varosha et les randonnées dans les montagnes Troodos et Fünffingergebirge.
Le voyage de recherche a été soutenu par Cyprustravel.