Les mystérieuses tortues luth sont gigantesques et difficiles à voir. Ces colosses, qui peuvent peser jusqu’à 500 kg, traversent plusieurs océans. Mais pour se reproduire, elles reviennent toujours, protégées par la nuit, sur la plage où elles sont elles-mêmes sorties de l’œuf. Et ce depuis la nuit des temps, car bien avant l’apparition des premiers dinosaures, ils procédaient déjà ainsi.
Dix natures exploratrices entreprenantes travaillent ensemble dans une station de recherche isolée, qui n’étudie pas seulement le comportement des reptiles les plus lourds. La protection contre les voleurs de gibier, qui déterrent les œufs du sable de lave noire et les vendent comme remède miracle aphrodisiaque, est également un aspect essentiel du projet de l’organisation LAST (Latin America Sea Turtles).
Biosphere Expeditions est une organisation de protection de la nature qui agit selon des normes éthiques et offre une expérience de vacances unique à ses participants, venus dans ce cas du Canada, d’Australie, d’Angleterre, d’Allemagne et des États-Unis. Lorsque l’on se présente à l’heure convenue dans un hôtel de la capitale San José, la suite du voyage vers la station de recherche isolée est parfaitement organisée. Aucune connaissance préalable du travail scientifique n’est requise. Ainsi, chacun participe à la recherche pendant une semaine et réalise en même temps son souhait de passer des vacances actives, au cours desquelles on vit beaucoup de choses tout en faisant du bien.
La station de recherche Pacuare sur la côte caraïbe du Costa Rica ne fonctionne que pendant la saison de reproduction, qui commence en mars de chaque année. Elle n’est accessible qu’à l’aide de petites embarcations, via des canaux aménagés il y a de nombreuses années pour désenclaver cette région isolée. La simplicité de l’hébergement passe au second plan une fois que l’expérience de vacances a pris son envol. Les participants sont d’accord sur ce point au plus tard après avoir fait connaissance avec les éléments lors de leur première nuit sur la plage.
Ces vacances donnent le sentiment de pouvoir être au plus près de l’observation systématique de la nature. Alexander von Humboldt, avec sa passion pour les détails, ou Charles Darwin, qui s’est penché sur l’évolution au cours d’un long voyage autour du monde, pourraient être des modèles pour notre groupe, qui, comme par hasard, rassemble aussi beaucoup de connaissances de base en sciences naturelles. Le couple de microbiologistes et le médecin d’Angleterre, la productrice de films et la pharmacologue du Canada, la thérapeute en acupuncture de New York ou la chimiste et l’avocate en brevets d’Allemagne. Tous trouvent l’échange d’expériences entre eux et l’exposé quotidien du biologiste qui dirige le projet scientifique très vivifiant. On s’entretient en anglais et on se tutoie dès le début.
Au nom de Biosphere Expeditions, Ida Vincent s’assure que le séjour se déroule en toute sécurité, qu’une bonne dose de science est transmise et que les attentes des participants sont satisfaites. Le chef de projet, le Dr Fabian Carrosco, et ses collaborateurs scientifiques nous familiarisent dès le jour de notre arrivée avec les procédures qui devront peut-être être appliquées dès la nuit suivante. Nous apprenons, à l’aide d’un modèle de tortue, quelles sont les activités nécessaires lorsqu’un groupe rencontre une tortue sur la plage. Il est particulièrement important de ne pas la déranger lorsqu’elle choisit l’endroit où elle va pondre ses œufs. C’est aussi la raison pour laquelle les vêtements sont sombres et qu’il est absolument interdit d’utiliser des lampes de poche à lumière blanche.
Il s’agit de noter les dimensions des tortues, mais aussi les numéros des plaques avec lesquelles chacune d’entre elles est marquée. On a par exemple découvert qu’au cours d’une saison de reproduction, qui dure de mars à août, les tortues luths viennent en moyenne sept fois à terre pour y pondre leurs œufs. Les tortues géantes n’atteignent d’ailleurs la maturité sexuelle qu’à l’âge de 30 ans. Lorsqu’elles ne sont pas dans les eaux du Costa Rica pour s’accoupler, elles séjournent de préférence dans l’Atlantique au large de l’Afrique du Sud, où elles se nourrissent d’algues et accumulent sous leur dos en cuir (pas de carapace) des réserves d’énergie suffisantes pour leur voyage bisannuel au Costa Rica.
Fabian est biologiste et expert en tortues marines. Avec quatre collaboratrices scientifiques, ce Mexicain enregistre depuis deux ans toutes les activités de ponte sur le tronçon de plage de plus de sept kilomètres du projet LAST. Pour les protéger des voleurs d’œufs, les pontes doivent être transportées immédiatement après la ponte vers un site de reproduction surveillé que l’équipe a fabriqué en début de saison avec du sable nettoyé.
Rencontre nocturne avec une créature mythique
Au milieu de la nuit, notre patrouille quitte la station. En silence, notre groupe marche sur la plage dans le sable mou, en file indienne, derrière la guide qui, au début, est difficile à voir dans ses vêtements sombres. Avec le temps, je trouve toutefois rassurant que son trébuchement attire l’attention sur le bois flotté, lui aussi à peine reconnaissable. Au bout d’une demi-heure, nous voyons déjà scintiller au loin une lumière rouge qui, en s’approchant, est reconnaissable comme appartenant à un autre groupe, parti plusieurs heures avant nous. Sur le chemin du retour, elle a repéré une tortue luth qui vient de décider d’un endroit pour pondre ses œufs. Nous en profitons pour suivre attentivement le déroulement à la lumière des trois lampes frontales rouges, avant de reprendre notre propre patrouille peu de temps après.
Concentrés, la collaboratrice scientifique Sarah Palmer et son groupe observent la tortue creuser un trou circulaire de 75 cm de profondeur dans le sable humide à l’aide de ses nageoires postérieures. Elle dicte la profondeur et l’emplacement de ce nid à sa collègue Grace Kibblewhite, ainsi que les dimensions de la carapace. Grâce au code de la plaquette de marquage, Fabian constatera le lendemain que cette tortue a déjà rempli un nid d’œufs il y a exactement 14 jours, à un endroit distant de 500 mètres.
Au moment de la ponte, la tension monte encore d’un cran. En effet, il s’agit maintenant de placer (sans que la tortue ne le remarque) un grand sac en plastique dans le nid, qui doit ensuite être rapidement retiré du trou rempli d’œufs, avant que la tortue ne referme le trou avec du sable à coups de nageoires énergiques.
Profondément impressionnés par les dimensions immenses de ce reptile d’environ 500 kg, qui ne peut se déplacer que difficilement en soufflant lourdement sur la terre ferme, nous poursuivons notre chemin dans l’obscurité. Sous le ciel étoilé, je suis impressionné par les nombreuses merveilles de la nature.
Des relations de voisinage avec la population
Les habitants de cette partie de la côte proche de l’embouchure du fleuve Pacuare vivent simplement. L’école la plus proche est loin et l’analphabétisme est très présent. La pêche, la récolte de noix de coco et de bananes servent à la consommation personnelle. Depuis longtemps déjà, la vente d’œufs de tortue est une source de revenus importante. En effet, la vente d’un seul œuf correspond à la moitié des besoins mensuels d’une famille de dix personnes. Bien que les tortues de mer soient également protégées par la loi au Costa Rica et que le commerce de produits à base de tortues soit interdit dans le monde entier depuis la Convention de Washington de 1973 sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, cela ne peut être mis en pratique que si l’on offre aux gens une compensation pour leur perte de revenus.
Et c’est là que Biosphere Expeditions agit à plusieurs niveaux. Les deux tiers des frais de participation à chaque expédition sont reversés au projet et financent ainsi, entre autres, le salaire des guides locaux qui offrent désormais leurs connaissances d’anciens braconniers à la recherche et à un public international, tout en étant en contact avec des langues étrangères.
La station de recherche est devenue un point d’attraction populaire et les matchs de football du dimanche opposant le Costa Rica au reste du monde assurent également un développement prudent de la région, bien que la priorité ait d’abord été donnée au sauvetage des espèces animales menacées.
Protection des espèces et science
Les rencontres nocturnes avec les braconniers me font froid dans le dos, mais ne sont pas vraiment dangereuses. Un « gentlemen agreement » respectueux s’est mis en place, selon lequel les confrontations sont évitées. Le premier qui atteint une tortue ovipare peut emporter les œufs. Les braconniers les vendent, les collaborateurs du projet les déposent sur le site d’incubation surveillé 24 heures sur 24 à la station de recherche. Afin de pouvoir observer la plage le plus étroitement possible la nuit, Fabian et sa collaboratrice scientifique Charline Fisseau établissent chaque soir un plan différent. Cela permet de rester imprévisible pour les braconniers et même de s’adapter à la plus grande pression de braconnage le week-end. En effet, des collecteurs d’œufs arrivent alors d’autres régions du Costa Rica.
En début de saison, la « hatchery » est remplie de sable tamisé, extrait du ressac et désinfecté par le soleil. Tous les champs délimités font l’objet d’une comptabilité précise. A la fin de la période d’incubation, qui dure en moyenne 60 jours, les tortues écloses sont comptées et mesurées. Elles peuvent alors parcourir les 20 mètres qui les séparent de la mer par leurs propres moyens. Ce faisant, elles mémorisent « l’odeur du pays », qui peut leur permettre de retrouver leur chemin 30 ans plus tard.
Les chances de chaque éclosion ne sont pas vraiment favorables, car statistiquement, seul un sur mille peut se reproduire. De nombreux ennemis s’attaquent surtout aux jeunes tortues de mer. L’homme est l’un des pires. Car même si le braconnage a été efficacement réduit sur cette partie de la côte et qu’il est donc probable que davantage de mères y reviennent à l’avenir, d’autres facteurs entrent en jeu.
Les influences environnementales telles que le changement climatique, le plastique dans l’eau de mer et la pollution lumineuse ont réduit l’espérance de vie moyenne des tortues luth, qui était autrefois de 75 ans, à 60 ans aujourd’hui.
Protection des espèces de tortues luths
Le projet de science citoyenne de Biosphere Expeditions étudie les tortues luths, une espèce menacée, au Costa Rica. Ces animaux sont énormes et difficiles à voir. Ces colosses pèsent jusqu’à 500 kilos et traversent plusieurs océans lors de leurs voyages. Mais pour se reproduire, elles reviennent toujours, à l’abri de la nuit, sur la plage où elles sont elles-mêmes sorties de l’œuf. Cela se produit depuis la nuit des temps. Bien avant l’apparition des dinosaures sur la terre.
Le projet de protection des espèces de l’organisation LAST (Latin America Sea Turtles) étudie le comportement des reptiles les plus lourds. Mais la protection contre les voleurs de gibier, qui déterrent les œufs du sable de lave noire et les vendent comme remède miracle aphrodisiaque, est également un aspect essentiel du travail.
Biosphere Expeditions est une organisation de protection de la nature qui agit selon des normes éthiques et qui offre aux participants une expérience de vacances unique dans une station de recherche isolée. Aucune connaissance scientifique préalable n’est requise. Ainsi, chacun participe à la recherche pendant une semaine et réalise en même temps son souhait de passer des vacances actives, au cours desquelles on vit beaucoup et on fait du bien.
D’autres aspects sont à prendre en compte : L’observation systématique de la nature à la Alexander von Humboldt / l’encadrement et la formation par des collaborateurs scientifiques / les patrouilles de nuit pour se protéger des voleurs de gibier / la ponte des tortues géantes / les travaux dans la station d’élevage (Hatchery) / les éclosions / les rapports avec les braconniers / la population
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Le séjour dans la station de recherche n’a pas été facturé